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(7/10) Serbie

20 mars 2020

L’état d’urgence sanitaire aux Balkans : fermeture des camps de migrants en Serbie

Rapport de Rosalie Lacombe
Candidate à la maîtrise à la chaire

Son mémoire s’intéresse principalement aux politiques migratoires européennes d’externalisation, aux migrations de transit ainsi qu’à la gestion et gouvernance des migrations dans la région des Balkans.


Suite à l’explosion des cas de coronavirus en Europe occidentale vers la fin février, les pays des Balkans voient également la COVID-19 arriver sur leurs territoires respectifs. Le 15 mars dernier, dans la foulée des décisions prises par la majorité des dirigeants européens visant à freiner la propagation du coronavirus, le président serbe Aleksandar Vucic déclare l’état d’urgence sanitaire en Serbie.  Les mesures imposées comprennent une série de restrictions, allant du confinement de la population à une interdiction formelle d’entrée aux étrangers. Les frontières sont désormais fermées aux nouveaux migrants ainsi qu’aux voyageurs en déplacements non essentiels. Mercredi le 18 mars, l’armée serbe est déployée aux frontières. Masqués et armés, ce sont donc désormais les militaires serbes qui assurent la surveillance quotidienne des frontières.

Candidate à l’adhésion à l’UE depuis 2012 et espace migratoire frontalier à l’Union européenne, la Serbie compte en date de mai 2020, un peu plus de 6000 migrants bloqués à la frontière, dans 19 centres gérés par l’État, avec l’appui d’ONG locales et d’organisations internationales œuvrant à la protection des migrants. Ces personnes espèrent pouvoir rejoindre un pays d’Europe de l’Ouest et du Nord.

En temps normal les migrants demeurent libres de se déplacer sur le territoire, et les centres demeurent « ouverts ». Avec les mesures sanitaires d’urgence adoptées par le gouvernement serbe, la situation est dorénavant bien différente. Les migrants ne sont actuellement pas autorisés à quitter les centres où ils séjournent et ne peuvent sortir que sous autorisation spéciale et pour des raisons exceptionnelles et justifiées. Des équipes de volontaires ont également été formées à travers le territoire afin d’aider le personnel du Commissariat à maintenir l’hygiène générale dans les camps. Il demeure toutefois difficile d’appliquer les mesures de distanciation sociale et de quarantaine recommandées dans les centres, qui regroupent parfois jusqu’à quelques centaines de migrants. Des efforts de contrôle accrus ont parallèlement été mis en place dans les centres d’accueil, où la tension entre les résidents s’accentue de jour en jour.

De façon générale, la population serbe craint l’évolution de la situation dans le contexte d’un système de santé déjà précaire. Les services hospitaliers ont été fragilisés par des années de pénurie et d’austérité, et le personnel médical a massivement migré vers les pays occidentaux. Les pays des Balkans craignent le pire alors que le virus fait des ravages chez leurs voisins européens qui, par comparaison, possèdent davantage de ressources financières et humaines.

Plusieurs observateurs craignent, d’une part, que la crise du coronavirus serve de vecteur de propagande pour alimenter de nouvelles politiques restrictives et pour justifier le blocage des migrants aux frontières et, d’autre part, qu’elle devienne un foyer pour la recrudescence d’un discours anti-migrant dans les Balkans, incluant en Serbie.

Liens web sur le sujet :
https://twitter.com/CdBalkans/status/1239816566671360000
https://www.lefigaro.fr…/coronavirus-en-serbie-couvre-feu-et-soldats-devant-les-hopitaux-20200322
http://www.rfi.fr/fr/podcasts/20200313-coronavirus-vecteur-propagande-anti-migrants
Photographies © Rosalie Lacombe